Les trois artistes sâemploient Ă explorer des notions contemporaines Ă travers des thĂ©matiques du langage corporel, du fĂ©minisme, de lâidentitĂ© et de la marginalitĂ© sociale qui se rencontrent dans les Ćuvres exposĂ©es.
Quâelles soient rĂ©alisĂ©es en textile, cĂ©ramique ou en toile, quâil sâagisse de sculptures, peintures et installations, les Ćuvres de Pia Camil dans leur medium et leurs matĂ©riaux mĂȘmes expriment des intentions fortes et un regard propre sur le monde contemporain. Pia Camil prĂ©sente ici une Ćuvre textile de 2016 rĂ©alisĂ©e par lâassemblage de vĂȘtements achetĂ©s Ă Iztapalapa, un marchĂ© de Mexico cĂ©lĂšbre pour sa prĂ©caritĂ©, et rĂ©alisĂ©s par les femmes de ce quartier. AffublĂ©s des logos de marques amĂ©ricaines, ces T-shirts Ă©voquent la puissante domination culturelle et Ă©conomique des Etats-Unis. Dans sa volontĂ© de revaloriser lâartisanat et le patrimoine du Mexique, Pia Camil a teint ces T-shirts. Les vides créés par les cols conservĂ©s dans le rideau Ă©voquent les fantĂŽmes des corps qui ont portĂ© ces vĂȘtements, signes inanimĂ©s de leur vĂ©cu et dâune valeur Ă la fois sentimentale et humaine pour lâartiste.
Le dĂ©sir dâĂ©mancipation et dâacceptation des marges est au cĆur de la dĂ©marche de Paul Maheke. Fortement imprĂ©gnĂ©es de la danse et de la mise en scĂšne, ses Ćuvres sâapparentent bien davantage Ă des expĂ©riences sensibles quâĂ des productions figĂ©es. Par la finesse et la poĂ©sie de ses performances et installations, il donne corps Ă un combat subtil vers lâaffirmation des identitĂ©s queers noires, souvent rĂ©duites au silence et Ă lâinvisibilitĂ© par lâomniprĂ©sence dâune culture blanche hĂ©tĂ©rosexuelle. Dans âI Lost Track of the Swarmâ, Paul Maheke se dĂ©-triple dans une chorĂ©graphie improvisĂ©e oĂč lâindividu se rĂ©sorbe dans son essence : le corps. EnvisagĂ© comme territoire, celui-ci se dĂ©ploie librement dans ce triptyque, oĂč il vient Ă apparaĂźtre dans sa totalitĂ©, parfois par fragments, mais toujours dans son mouvement. Par ce bal gracieux, lâartiste nous invite Ă lâorĂ©e de son individualitĂ© en faisant appel Ă une sensibilitĂ© commune Ă tous. TantĂŽt se confondant dans lâombre, tantĂŽt sâĂ©vaporant dans la lumiĂšre, sa silhouette porte en elle le passĂ© dâune oppression, certes, mais dâabord et surtout le futur dâune libertĂ©.
Walter Pfeiffer, nĂ© en 1946, est, lui aussi, prĂ©occupĂ© par le dualisme masculin-fĂ©minin. Dans I'Ćuvre de Walter Pfeiffer, le "hasard" prend une signification immĂ©diate : objets, perspectives ne sont ni des accessoires, ni des facteurs esthĂ©tiques. Ils sont le prolongement, concrĂ©tisĂ© par l'image, d'une certaine maniĂšre de regarder, d'agir, de bouger. En d'autres termes, le facteur esthĂ©tique est l'attitude de l'individu face Ă lui-mĂȘme et Ă son entourage. Cette interprĂ©tation est confirmĂ©e par la maniĂšre dont sont prĂ©sentĂ©es les Ćuvres de Pfeiffer la prĂ©sentation tĂ©moigne d'un certain humour qui n'est pas gratuit mais reflĂšte, au contraire, une optique qui oscille entre la sensualitĂ© diffuse et l'ironie.